Faire face à l'impact de la COVID-19 sur la santé mentale

Faire face à l'impact de la COVID-19 sur la santé mentale
WHO/Julie Pudlowski
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Faire face à l'impact de la COVID-19 sur la santé mentale

Kampala - Dan Bukenya était accablé par l'angoisse. Il ne dormait pas la plupart des nuits et était souvent contrarié. Il a essayé de se soigner lui-même, en vain. Ce n'est que lorsqu'il a accepté d'être suivi dans un hôpital qu'il a pu être soulagé. « Ils m'ont donné des médicaments et j'ai enfin pu dormir. »

Trois semaines plus tôt, ce père de 32 ans avait été diagnostiqué positif à la COVID-19, mais il ne souhaitait pas solliciter une aide médicale. Les jours qui ont suivi ont été de plus en plus stressants. Il travaillait de longues heures pour essayer d'oublier son diagnostic. Mais l'agonie persistait. « Je voulais me battre contre tout le monde. J'étais tout le temps en colère », dit Bukenya, qui est devenu trop déprimé pour prêcher l'évangile - ce qu'il aimait faire quand il ne vendait pas des téléphones et autres appareils électroniques dans sa boutique du marché de Nakasero à Kampala.

Lorsqu'il s'est finalement présenté à l'hôpital, les médecins ont découvert qu'il souffrait également de troubles mentaux. La COVID-19 est associée à des complications neurologiques et mentales telles que le délire, l'agitation, les accidents vasculaires cérébraux, l'insomnie, l'anxiété ou la dépression, selon une étude récente de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). Les nombreuses restrictions imposées pour ralentir la propagation du virus - la distanciation physique, le confinement, la fermeture d'entreprises ‘non essentielles’, les restrictions de voyage - ont également entraîné une augmentation des niveaux de stress, d'anxiété et de dépression.

Bien qu'il n'existe pas encore de données publiques en Ouganda sur l'ampleur de l'impact de la pandémie sur la santé mentale, certains médecins font état d'un nombre croissant de patients traités pour des maladies mentales suite à l'apparition de la COVID-19 dans le pays. « Je reçois entre 10 et 15 patients par jour, ce qui représente une faible proportion de l'ensemble des patients qui sont admis. J'en verrais beaucoup plus si l'EPI (équipement de protection individuelle) que nous sommes tenus de porter dans le service ne rendait pas les interactions aussi difficiles », déclare Dr Joseph Okurut, responsable de psychiatrie clinique à l'hôpital d'Entebbe. « La plupart des patients n'avaient jamais eu de problèmes de santé mentale. »

La pandémie a également perturbé les services de santé mentale déjà limités dans de nombreux pays africains, les patients évitant de recourir aux services hospitaliers par crainte de contracter le virus. L'annulation des services médicaux non urgents a également fait chuter le nombre de patients, et dans le même temps, la restriction des déplacements a empêché les gens de se rendre dans les structures de santé.

En Ouganda, comme dans la plupart des pays africains, les soins de santé mentale étaient déjà faibles avant l'épidémie. Le pays ne compte que 47 psychiatres, dont la plupart sont basés à Kampala, pour une population de 42 millions d'habitants. Les services de santé mentale sont principalement concentrés autour de la capitale. De plus, les unités de santé mentale des hôpitaux de référence régionaux ont été transformées en centres de traitement et d'isolement de la COVID-19.

Dr Florence Baingana, conseillère régionale de l'OMS Afrique pour la santé mentale et l'abus de substances psychoactives, a expliqué que si la plupart des pays africains ont prévu la santé mentale et un soutien psychosocial dans leurs plans d'intervention face à la COVID-19, très souvent le budget supplémentaire n'a pas été entièrement alloué à la mise en œuvre de ces plans, et ils signalent un manque de personnel de santé, de matériel médical, de médicaments et d'équipements de protection individuelle.

Pour renforcer le soutien en matière de santé mentale et de soutien psychosocial dans le cadre de la réponse à la COVID-19, les autorités sanitaires ougandaises augmentent les effectifs et le financement. Une équipe de 35 agents de santé a été déployée dans la région centrale, où se trouve la capitale Kampala, et jusqu'à trois travailleurs de la santé mentale sont rattachés à chaque site de quarantaine, explique Dr Kenneth Kalani, chef de l'unité de santé mentale et de soutien psychosocial au sein de la cellule opérationnelle de la COVID-19 du ministère de la Santé. « Environ 230 travailleurs psychosociaux ont été formés dans tout le pays pour s'assurer que les services de santé mentale et de soutien psychosocial sont opérationnels ».

Toutefois, une fois que les patients quittent l'hôpital, nombre d'entre eux n'ont pas les moyens de revenir pour une consultation de suivi. D'autres moyens d'atteindre les patients, tels que la téléconsultation, sont déjà mis en œuvre. En outre, une ligne d'assistance téléphonique doit également être mise en place pour permettre le suivi des patients ayant quitté l'hôpital.

Grâce à cette ligne d'assistance, les survivants de la COVID-19 recevront des appels générés automatiquement deux jours, deux semaines et six semaines après avoir quitté l'hôpital. En fonction de leurs réponses à une série de questions, ils pourront être invités à revenir pour un dépistage approprié et une éventuelle orientation vers un hôpital.

Il reste encore beaucoup à apprendre sur l'impact à long terme de la COVID-19, explique Dr Noeline Nakasujja, membre du comité consultatif scientifique du ministère de la Santé sur la santé mentale et le soutien psychosocial. « Nous ne sommes pas sûrs des effets à long terme de la pandémie sur les personnes. »

Pour Bukenya, qui s'est rétabli de la COVID-19 et qui va bientôt mettre fin à son traitement de santé mentale, une certaine note de réminiscence et de regret résume son expérience. « Je regrette les jours où je ne craignais rien. Je ne pense pas que je redeviendrai un jour comme j'étais avant. »

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