Le système qui bloque l’importation de cas de COVID-19 au Rwanda

Le système qui bloque l’importation de cas de COVID-19 au Rwanda

Kigali – Lorsque les réacteurs de l’avion s’éteignent, les passagers arrivés à destination fouillent dans leurs bagages à main pour se munir des documents à présenter aux agents du service d’immigration. Cette scène se déroule à l’Aéroport international de Kigali, un carrefour régional fréquenté. Le pays a mis en œuvre un système de suivi électronique innovant pour arrêter la propagation domestique de la COVID-19 importé par les passagers en provenance de l’étranger.

Tout commence par un test de dépistage de la COVID-19 réalisé avant le départ, selon la méthode d’amplification en chaîne par polymérase (PCR) standard, valide pendant 72 heures au maximum. Les voyageurs remplissent un formulaire en ligne et entrent dans le système le résultat de leurs tests et leur réservation dans l’un des hôtels désignés. Un code unique à présenter à l’arrivée est ensuite émis pour chaque voyageur.

A l’aéroport, les passagers internationaux doivent ensuite subir un deuxième test PCR, effectué par un professionnel de la santé. Le processus prend moins d’une heure et les visiteurs peuvent ensuite se rendre dans l’un des plus de 80 hôtels de transit désignés pour la quarantaine – les passagers rwandais donnent leurs coordonnées et rentrent chez eux – pour attendre les résultats des tests qui sont prêts dans un délai de 12 à 24 heures.

Les résultats des tests subis à l’arrivée sont affichés sur un portail en ligne accessible à l’aide d’un code. Les hôtels qui accueillent les voyageurs indiquent sur un tableau de bord de surveillance en ligne de la COVID-19, à la sortie de ces voyageurs, que les résultats de leurs tests de dépistage ont été publiés. Si le test de dépistage s’avère positif, les patients asymptomatiques font l’objet d’un suivi rapproché pendant une période de 14 jours à l’issue de laquelle un test de contrôle est réalisé. Ces voyageurs sont hospitalisés s’ils développent une forme grave de la maladie.

« Le nombre de cas importés de COVID-19 a nettement diminué grâce au système de surveillance du pays », affirme Misbah Gashegu, le point focal à l’aéroport de Kigali du Centre biomédical du Rwanda. Actuellement, deux à trois cas sont détectés chaque semaine parmi les passagers qui débarquent dans le pays, contre 20 cas par semaine environ peu après la mise en place du système en août 2020. Entre 2500 et 3500 voyageurs internationaux arrivent dans le pays chaque semaine.

Dans le passé, une équipe d’agents de santé prélevait des échantillons sur les passagers à l’arrivée dans les hôtels, mais les risques de perte d’échantillons étaient plus élevés, les retards dans la communication des résultats pouvaient atteindre 72 heures et l’encombrement dû au stationnement de véhicules, des fournitures et de la présence de personnel posait problème. « La logistique était mouvementée et fastidieuse », soupire le Dr Gatare Swaibu, chef du département des services biomédicaux au Centre biomédical du Rwanda. « Le plus grand défi était le délai de retour des résultats des tests. »

Le Dr Swaibu souligne qu’en plus de dissuader l’importation de cas, le système de surveillance joue un rôle décisif dans la détection et l’endiguement de tous les variants préoccupants de la COVID-19. Un seul cas du variant identifié pour la première fois en Afrique du Sud a été détecté récemment. Ce cas a été rapidement isolé, et toute propagation a ainsi été évitée.

« Le fait de pouvoir détecter et endiguer des variants préoccupants avant qu’ils ne se propagent à l’ensemble de la population améliore notre riposte globale à la COVID-19 dans le pays », se réjouit le Dr Swaibu. « En évitant les variants potentiellement plus contagieux, nous pouvons nous focaliser sur la lutte contre la pandémie en écartant la menace supplémentaire que représente l’importation de types du virus plus transmissibles », indique-t-il.

Il ajoute : « Lorsque nous détectons un variant chez un passager arrivant dans le pays, soit ce passager reste à l’hôtel de transit jusqu’à ce qu’il ou elle soit débarrassé(e) du virus, soit nous plaçons cette personne en isolement dans [une résidence] ou sous traitement à domicile ».

En collaboration avec le ministère de la santé, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a fourni un soutien technique à la mise au point du système de suivi des passagers à l’aéroport et à sa mise en relation avec le laboratoire principal. Avec l’appui de donateurs, parmi lesquels les gouvernements du Canada, de la Chine, de l’Allemagne et du Japon, l’OMS a déployé un responsable technique à l’aéroport pour aider à gérer le système.

« Le système de surveillance du Rwanda aux points d’entrée du pays joue un rôle essentiel dans la riposte à la COVID-19 et peut être reproduit dans d’autres pays pour les aider à endiguer la propagation du virus et sauver des vies », affirme Dr Mary Stephens, fonctionnaire technique au Bureau régional de l’OMS pour l’Afrique. « Alors que les voyages devraient augmenter maintenant que l’été arrive dans l’hémisphère nord, le risque de propagation de la COVID-19 devrait aussi augmenter, et nous ne pourrons détecter et endiguer les infections généralisées qu’avec des systèmes de surveillance efficaces. »

Défis

Même si l’on exige des voyageurs qu’ils présentent un test de dépistage négatif, vérifier l’authenticité ou l’obtention frauduleuse d’un vrai test est loin d’être une sinécure. C’est justement l’une des principales raisons du test – dont le coût est pris en charge par le voyageur – qui est fait à l’Aéroport international de Kigali, explique Misbah Gashegu.

Les autorités sanitaires du Rwanda étudient les moyens de normaliser le certificat de test PCR pour les voyageurs, et collaborent avec les organismes régionaux et internationaux de réglementation du secteur de la santé ou des voyages aériens sur les possibilités d’établir un certificat de test international fiable pour la COVID-19. Les faux certificats du côté des départs sont relativement faciles à détecter et à dissuader, affirme Misbah Gashegu. Quelques faux certificats ont été détectés, mais la pratique n’est pas répandue.

Se tourner vers l’avenir

Des efforts sont aussi réalisés pour automatiser l’extraction virale au laboratoire d’analyse de l’aéroport, afin de réduire davantage le temps d’obtention des résultats. L’OMS a fourni deux machines à PCR au laboratoire de l’aéroport, et a déployé des techniciens de laboratoires et des analystes.

Au-delà de l’aéroport, le Rwanda prévoit d’étendre le système de surveillance à ses principales frontières terrestres. L’année dernière, la Communauté de l’Afrique de l’Est – dont le Rwanda est membre – a lancé une application permettant de délivrer des certificats de tests numériques pour la COVID-19 reconnus par les États partenaires afin de faciliter les mouvements transfrontaliers de marchandises.

« Nous cherchons à reproduire le même système à d’autres points d’entrée, en particulier aux frontières les plus fréquentées du Rwanda avec la République-Unie de Tanzanie, l’Ouganda et la République démocratique du Congo », indique le DSwaibu.

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